jeudi 16 avril 2009

Objectivité

Votre collègue est en dépression alcoolisée. Sa femme l'a quitté et il sombre. Après un congé maladie de 2 mois, il pense que venir travailler peut lui changer les idées. Il vient donc comme un gros phoque se poser au boulot manifestement bourré. Parfois même il trébuche et vous colle son gros ventre dans le dos. Au bout de trois jours vous avez des envies de meurtre. Vous parlez à l'équipe des dangers que court votre collègue : entre autres choses, il fait 40 km par jour en voiture ivre pour venir travailler. Vous hésitez à parler du coup de fusil que vous n'allez pas tarder à lui tirer en pleine figure. On vous demande de « produire un écrit », comme si on avait besoin de vous pour constater cet état.

Vous vous attachez, ainsi que vous l'avez fait enseigner à bon nombre de professionnels, à décrire la situation avec la plus grande objectivité : je soussignée, constate depuis son retour de congé maladie le comportement suivant chez M. X :

  • il produit des sons étranges et inarticulés où on arrive à discerner les mots couille et bite au moins une fois par tranche de cinq minutes

  • il sent la vinasse et le vomi (non, écrivez plutôt : il dégage une odeur suspecte d'alcool aigre)

  • il téléphone le soir et le week-end à des salariés en CDD ou à des clients pour leur demander de lui trouver une femme

  • il avoue être incapable de travailler

  • il a des accès d'euphorie qui se traduisent par des déclarations d'amour pour tout ce qui passe à sa portée : vous, vos voisins de bureau, la photocopieuse, la porte, les trombones ...

  • il est sale et ne se rase pas

  • il tousse très fort et on a l'impression qu'il va vomir sur son bureau (mais une impression constitue-t-elle un élément objectif ?)

La Direction a résolu le problème en vous changeant d'établissement. Vous ne serez pas la cause de la mort violente de votre collègue et vous ne finirez pas votre vie en prison.

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