jeudi 28 mai 2009


Prudence et le papier tue-mouches

Un dimanche, chez nos amis Prudencepetitpas, nous buvions un thé en jouant au Pictionnary, quand Prudence s'est levé et s'est collé la tête sur un des papiers tue-mouches suspendus au plafond. Le souvenir de Prudence, qui éprouve une profonde répulsion pour les mouches, agitant la tête en criant, s'emmêlant chaque fois plus le ruban avec 10 000 mouches dans les cheveux, longs à l'époque, est très plaisant. Quand j'ai la déprime, je repense à ce moment. Je vous livre ci-dessous le mail de Prudence tel quel.

Journal d'un Hédoniste contrarié

(La mouche et le papier tue-mouches)

J'avais décidé de m'installer sans résistance dans mes névroses préférées, comme on s'installe dans un hamac pour s'octroyer une goutte de répit dans une vie consacrée à une épuisante lutte contre soi-même.

J'avais décidé que ce «moi-même» que j'avais entrepris depuis longtemps de connaître serait celui-là même que l'évidence me tendait à bout de bras, parfaitement présent et assumé et que je ne lui poserais aucune question, n'attendrais aucune justification de sa part. (un peu comme on accepte sans rechigner le cadeau d'une aiïeule qui est convaincue que vous chaussez toujours du trente quatre, comme lorsque vous aviez sept ans, c'est à dire à peu près à l'époque où, pour elle, le monde à cessé d'évoluer pour enfin se stabiliser à sa convenance). C'était un cadeau que je m'octroyais, sous la forme d'une paire de parenthèses encadrant un tout petit et délicieux espace ponctué de trois petits points .

On ne mesurera jamais assez l'intensité du plaisir que ressent celui qui décide de s'offrir une trêve, comme par exemple se remettre à sucer son pouce, se remettre à fumer, ou s'offrir un petit circuit électrique de formule 1 miniature pour Nöel (soit dit en passant , c'est peut être la meilleure façon de se débarrasser définitivement de ces petits vices : en effet, vous vous rendrez vite compte que votre pouce n'a plus le même goût qu'autrefois, que la cigarette vous fait tousser, et que les petits bolides déraillent tout le temps. Le temps a passé, le charme n'opère plus , vous allez donc pouvoir employer tout votre temps à la recherche de nouveaux vices : au fond,c'est peut être cela aussi, grandir).

J'étais donc dans mon jardin, allongé dans mon hamac en songeant délicieusement aux nouvelles névroses auxquelles j'allais pouvoir m'adonner. J'en étirais tout l'éventail, comme une broderie soyeuse sur laquelle miroitaient mille bulles de lumière. Cette occupation précieuse requiert de la part de celui qui s'y adonne un calme parfait afin que puisse se déployer le repos de l'âme et l'état de conscience nécessaire. Ca, tout bon dalaï lama vous le confirmera, je n'ai rien inventé. (vous pouvez lui demander, au dalaï, il habite pas très loin de chez moi, si vous voulez, je vous file son numéro de téléphone, dites lui que vous appelez de ma part, c'est un pote etc,etc,etc.).

Bref, tout était pour le mieux, sauf les mouches...

Car la mouche, être perfide, attend toujours son heure.

Elle sait attaquer l'être vulnérable au moment où il est le plus vulnérable.

Et j'étais vulnérable et la mouche m'attaqua.

Ou plutôt m'attaquèrent, car elles furent bientôt plusieurs.

D'où viennent elles?

Comment se fait il qu'il n'y en a aucune et que, tout à coup, il y en a plein?

Comment font-elles?

Comment font les mouches pour voler aussi vite et en faisant autant de bruit?

Avez-vous déjà essayé d'observer le vol d'une mouche?

Avez vous constaté à quel point il est stupide, désordonné, agaçant, illogique et sans objet?

C'est sans doute ce que vous vous êtes dit.

Certes.

Mais allons plus loin dans la réflexion.

Le vol de la mouche n'est ordonné que dans le simple but d'incommoder l'honnête homme.

La mouche n'est jamais là où l'on croit qu'elle est . A peine posée, déjà envolée.

Elle est déjà à côté, inécrasable, ou, encore pire, sur votre nez.

Que faire, sinon s'armer?

Ne pas hésiter à réunir l'arsenal entier de la guerre anti mouche: tapettes, bombes aérosols, pièges et même, papier tue-mouches.

Ce que je fis.

En m'octroyant, esthète, une légère concession à la nostalgie pour le cinéma exotique de la période d'avant guerre. En effet, le papier tue-mouches fait partie des accessoires obligatoires pour suggérer une ambiance torride, au même titre que le ventilateur de plafond, le cactus dans un coin de l'écran ou le verre de whisky à moitié vide sur le rebord d'un piano.

J'en plaçai deux rouleaux, disposés suivant les règles strictes de l'art de la guerre : à savoir un à chaque extrémité du salon (oui, est il nécessaire de le souligner, j'avais depuis longtemps abandonné mon hamac et porté la lutte jusqu'à l'intérieur de ma demeure : cela s'appelle la guérilla domestique).

D'autre part, chacun sait que le papier tue-mouches est exclusivement une arme d'intérieur : il n'y a pas de plafond dans la nature.

Voilà.

Sur la suite je voudrais passer avec pudeur, sans m'étendre plus en avant sur les causes et les circonstances.

Toujours que je me suis retrouvé, un jour que nous avions des invités (Pénélope Cruz et cet excellent acteur américain dont j'oublie toujours le nom, mais peu importe) à la maison, les cheveux capturés et emberlificotés dans le papier tue-mouches, pris au piège que j'avais moi- même dressé.

Mais comment, direz vous?

A la suite d'une passe d'arme avec une mouche au cours de laquelle j'essayai de la diriger, à grand renfort de geste circumambulatoires et aériens, vers le piège collant.

D'où la situation extrême où je me trouve maintenant, me voici doublement pris dans un piège définitif, puisque haïr la mouche et le papier tue-mouche, c'est haïr en même temps la maladie et le remède qui permettrait d'en guérir.

Coincé entre la maladie et des remèdes bourrés de contre-indications et d'effets secondaires non désirés, ceci est bien à l'image de l'absurde situation de l'homme contemporain qui se débat entre les délices de ses névroses et sa volonté de s'en sortir.

Depuis, j'ai fait construire un plafond au dessus de mon jardin et je me suis tondu le crâne.


9 commentaires:

F.TUL a dit…

Il est folle à lier ce prudence! Il est aussi bavard dans la vraivie ? pasque là jte signale que tu fais pas le poids, il te prend la place de 15 billet. Mais on lui pardonne, j'y étais pas mais j'ai bien rigolé, je suis obligé de passer tous les jours maintenant.

Rosana a dit…

Prudence est un grand bavard, ça c'est vrai. On ne le dit jamais assez, il ne laisse personne en placer une, jamais, c'est horrible, quand il commence il ne s'arrête plus. Pire que moi. Tu peux passer tous les jours, on sert le café ou le coca light à volonté.

Anonyme a dit…

c'est la suite de prudence et les animaux ?

Rosana a dit…

@anonyme : ben oui, et on attend le lérot dans la cuvette des WC avec impatience ...

Rosana a dit…

@prudence : serge m'a dit de te dire qu'il était très flatté d'être cet acteur américain très beau dont tu ne sais plus le nom, et j'en profite pour dire que je suis aussi très flattée, signé pénélope

lamy a dit…

@Rosana :
De rien.
Indiana Petipas.

Anonyme a dit…

jajajajajajajajajajajajajajajajajajajajajajajajajajajaj

indyprioud a dit…

JE SUPPOSE QU'ANONYME EST NATIF D'OUTRE RHIN.
OU DE LA JAMAÏQUE..........

INDYPRIOUD

Rosana a dit…

@indy : non, il doit être espagnol. En espagne, les chiens font guau, et on rigole en faisant jajaja ou jejeje qui est plus sardonique.